BASTIEN DOUDAINE

 

©Marie Dumont

Bastien Doudaine est un photographe français à la pratique photojournalistique et développant une approche documentaire. Initialement diplômé en médecine générale, c'est une fois les études médicales terminées qu'il peut se consacrer à la photographie. Le travail en cabinet lui permet ainsi de garder un pied dans une discipline en constante évolution et de nourrir ses travaux photographiques. L'écoute attentive est pour lui une prérogative plus que nécessaire à ses activités professionnelles.

Au départ éloigné des questions de santé dans sa photographie, c'est finalement la crise sanitaire qui le rapproche à nouveau des hôpitaux. Basé un temps sur l'île de la Réunion, il interroge les évolutions des pratiques de soin ancestrales, en les conjuguant aux problématiques environnementales. En métropole ou à Mayotte, il questionne l’accès aux soins  à la rencontre des soignant·es, et procède à un témoignage et une analyse du médico-social avec une solide connaissance de terrain.

Il collabore régulièrement avec la presse nationale, notamment Le Monde, Libération, Médiapart, La Vie, Le Pélerin, BOUKAN, GEO... et a intégré le studio Hans Lucas en 2020. Depuis 2022, il suit le programme de mentorat du collectif Item. Fin 2023, il cofonde le collectif Relief avec trois journalistes et photographes.

Instagram : @bastiendoudaine

MAYOTTE SOUS FRANCE - 2023

À Mayotte, 101ème département français et île de l'archipel des Comores, le système de santé ne parvient pas à répondre aux besoins de soins d’une population dont 77% vit sous le seuil de pauvreté.

Tout, ou presque, repose sur le Centre Hospitalier de Mayotte (CHM), unique instance publique de santé du territoire. Structure de référence dans le canal du Mozambique, le CHM assure tant bien que mal les urgences et le suivi médical malgré un important déficit de soignant·es, en particulier de médecins, infirmiers et sage-femmes, venu·es pour la plupart de métropole. Les autres soignant·es et personnels hospitaliers, mahorais·es en grande majorité, tiennent un système en constante tension et assurent les traductions en shimaoré ou shibushi en plus de leurs compétences de soins.

La précarité est responsable de la majorité des problématiques de santé du territoire, avec un accès inconstant à l’eau potable, une alimentation carencée et déséquilibrée, des maladies infectieuses ou de cancers avancés soignés tardivement…

Sous l’injonction du régime dérogatoire applicable à Mayotte mis en place pour « limiter l’attractivité sociale et administrative », des mots de Gérald Darmanin, alors ministre de l’Intérieur, ni la Couverture Maladie universelle ni l’Aide Médicale d’État ne sont applicables. Contrairement aux idées reçues, les étranger·es présent·es sur le territoire ont moins accès à la santé qu’en métropole. Quant aux plus aisé·es, ils vont faire leurs examens médicaux ou autres interventions chirurgicales sur l’île de la Réunion, voire en métropole.

Durant Wuambushu, l’hôpital de Mayotte est devenu le lieu de toutes les tensions. En réaction à la fermeture du port d’Anjouan par l’Union des Comores, les collectifs des citoyens de Mayotte ont décidé de bloquer certaines dispensaires, consultations et retrait de médicaments, aux « étrangers ». Des nombreux patients se sont retrouvés sans possibilité de récupérer des traitements pourtant vitaux. Une situation exceptionnelle, sans aucune réaction des autorités pour lever les blocages, révélatrice des tensions qui règnent sur l’île alors que ses habitants se sentent oubliés par Paris.

Cet extrait de ce documentaire photographique explore les enjeux de santé des plus précaires, mahorais, comoriens ou d’Afrique de l’Est, sur une île française où la législation nationale n’a qu’une existence partielle. Comme une France à deux vitesses, ici l’accès aux soins pour tous n’est pas une réalité.