Bouche de sable

Le port d'Ondarroa, au pays Basque espagnol, compte une large communauté de pêcheurs sénégalais. Sur les chalutiers hauturiers, dans les conserveries ou sur le port, la langue parlée lorsque les bateaux reviennent de leur campagne est essentiellement le woloff.

Les pêcheurs en retraite qui arpentent quotidiennement le port pour "constater" la marchandise, attestent qu'il y a des Sénégalais depuis au moins deux décennies à Ondarroa, mais que l'année 2006, marquée par l'arrivée de plusieurs dizaines de milliers d'Africains et Sénégalais en Espagne, est venue grandir la population des ports des côtes basques et galiciennes. Terre d'émigration plutôt que d'immigration, l'Espagne est passée de 600 000 migrants en 1998 à 5,6 millions en 2009. Les îles Canaries, dont la majorité des pêcheurs d'Ondarroa a emprunté le chemin en pirogue en 2006, a vu environ 30 000 arrivées la même année.

La crise économique de 2008 n'a pas épargné le secteur de la pêche en Espagne, et plus généralement en Europe. À Ondarroa, la main d'œuvre volontaire dans la zone portuaire, embauchée de manière flexible et payée de la main à la main, est rapidement devenue excédente en rapport au volume de poisson ramené de la pêche. Le rythme de travail journalier est irrégulier, le quotidien s'organise autour des cours d'espagnol, dispensés par une association locale, de la vente ambulante et de l'attente pour l'embauche au port.

Djibril, Lassana, Aliou et l'ensemble des pêcheurs qui travaillent au port y sont cantonnés le temps de recevoir une autorisation de séjour sur le territoire; sésame qui leur permettra de partir en mer, de travailler en conserveries, ou de voyager au Sénégal.