Ombres en résistance

Bertrand Gaudillère / Maïté Darnault / Daphné Gastaldi / Mathieu Martiniere / 

Ils s’appellent Irène Frachon, Antoine Deltour, Hervé Falciani... Certains sont devenus très médiatiques, d’autres tentent de préserver leur anonymat. Mais tous, à un moment sont sortis de l’ombre pour dénoncer des scandales environnementaux, des drames sanitaires ou des «affaires» politico-économiques. Traitres pour les uns, héros modernes pour d’autres, ils sont de plus en plus nombreux à « lancer l’alerte » en France et à s’opposer à des multinationales, des banques voire à des Etats. Il aura fallu attendre fin 2016 pour que la patrie des droits de l’homme se dote d’un dispositif de protection censé mettre les lanceurs d’alerte à l’abri des représailles. L'adoption de la loi Sapin II n’a cependant pas encore permis de changer le quotidien de ceux qui ont pris le risque de briser leur carrière, leur vie de famille, leur santé, au nom de la vérité, de l’éthique, de l’intérêt général ou du principe de précaution. Ce sont ces résistances fragiles que le photographe Bertrand Gaudillère et les journalistes Mathieu Martinière, Maïté Darnault et Daphné Gastaldi ont voulu mettre en avant avec une série de portraits intimes et composites qui évoquent le courage, l’abnégation, l’abattement et la place envahissante, voire obsédante que « l’alerte » a pris dans leur vie.

 

Fronts du Nord

Nicolas Leblanc / 

Le Nord et l'Est sont devenus des terres de prédilection pour le Front National et autant de lieux de confrontation. Même battus au second tour des élections régionales, Marine Le Pen et Florian Philippot ont conduit des listes qui ont obtenus jusqu’à 70% des suffrages exprimés, confirmant ainsi l’ancrage durable et profond de l’extrême droite dans les Hauts de France et le Grand Est... mais aussi du même coup la volonté d’une partie de la population de s’y opposer. Alors qu’à chaque nouveau scrutin, les anciens bassins miniers de la France semblent céder un peu plus aux sirènes frontistes, le refus du FN prend aussi de l’ampleur. Au fil des mois, à l’occasion d’une activité sociale ou culturelle, avec l’aide parfois des médias et des institutions, ou simplement autour d’une bière entre amis qui ont choisit l’humour comme arme, une opposition politique s’exprime et prend forme. Photographe originaire du Nord et vivant aujourd’hui en Lorraine, Nicolas Leblanc parcourt ces territoires qu’il connaît bien et documente une résistance multiforme, empreinte d’une culture régionale qui s’est donnée un objectif national : barrer la route à Marine Le Pen d’ici l’élection présidentielle de 2017. 

 

Les profiteurs

Morgan Fache / 

Abus de confiance, prise illégale d’intérêt, conflit d’intérêt, achat de vote, favoritisme... L’île de la Réunion a depuis longtemps la triste particularité d’être l’un des départements français les plus corrompus. Fin 2015, alors qu’un projet démesuré de construction d’une nouvelle route sur le littoral défraye la chronique de ce département d’outre-mer, une personnalité politique réunionnaise décide de mettre la corruption au cœur de ses préoccupations. C’est cette lutte au nom de l’intérêt commun contre les «profiteurs» menée par le leader du mouvement Rezistans/ARCP et une poignée de citoyens qu’a choisi de suivre le photographe Morgan Fache. Dans la logique de ses précédents travaux photographiques documentaires sur l’exclusion et les questions postcoloniales qui explorent les multiples facettes de l’identité réunionnaise, Morgan Fache pose son regard sur des habitants et des paysages qui tentent d’endiguer un fléau qui gangrène tout un territoire.